Nicolas Sarkozy vient de prononcer, le 8 septembre à Bruxelles, un important discours sur l’avenir de l’Europe. Je me réjouis qu’un candidat de premier rang à l’élection présidentielle de 2007 s’exprime sur ce thème décisif : l’Europe sera en effet au cœur de l’action du Président qui succèdera à Jacques Chirac – du moins elle devrait y être- et elle ne doit pas être escamotée dans la campagne électorale. Il serait bon que les autres candidats majeurs s’expriment aussi : seul Dominique Strauss-Kahn l’a fait parmi les socialistes, ainsi, il est vrai, que Laurent Fabius, mais avec des options que je réfute. Pour tant, si je salue l’existence de ce discours, je n’en partage pas la philosophie, ni les propositions. En 2002, Jacques Chirac, de manière mensongère, promettait « la France en grand ». Aujourd’hui, c’est la perspective de l’Europe en petit, d’une mini-Europe, que dessine Nicolas Sarkozy. Il le fait sur tous les plans. Pour relancer le débat institutionnel, il propose un mini-traité, très en deçà du TCE. L’Europe politique en sortirait réduite, et son ambition sociale serait nulle. En effet, aucune des intentions d’un traité social –à commencer par la prise en compte des services publics à l’échelle européenne- n’est ici affirmée. Il faudra, pour relancer l’Europe, une vision plus vaste. La conception des frontières de l’Europe par le Président de l’UMP est également restrictive. L’Europe, pour lui, peut au fond vivre dans ses limites actuelles, se contentant d’étendre à notre voisinage le marché et certaines politiques. Nicolas Sarkozy s’enferme par ailleurs dans son obsession anti-turque. Je crois au contraire que la perspective de l’Europe à 30 ou 35 doit demeurer, que l’élargissement doit être maîtrisé, expliqué, partagé, mais pas arrêté, et que la porte de l’Union doit rester ouverte à la Turquie, si celle-ci évolue en profondeur. Enfin, le discours de M. Sarkozy est d’une insigne faiblesse sur les finances de l’Union, parce qu’il refuse de reconnaître la nécessité impérieuse d’accroître fortement et de réorienter puissamment vers la croissance, l’emploi, l’innovation, le budget de l’Europe. En réalité, Nicolas Sarkozy reste –sans cette fois le dire clairement- attaché à une Europe intergouvernementale, pilotée par un « directoire » des « grands » États. Il nie ainsi la vision fédéraliste, universaliste, d’une union politique à l’échelle du continent, incarnée par des institutions communautaires réformées, plus légitime, plus démocratique, plus efficace. L’Europe n’a pas grand-chose à attendre d’une approche aussi étriquée et dénuée de générosité. Par Pierre Moscovici Pierre Moscovici est vice-président du Parlement européen et ancien Ministre délégué français, chargé des Affaires européennes  (Taken from www.europeus.org)
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